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Depuis la permaculture, jusqu’à la civilisation 3/3

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Voici la troisième et dernière partie de cet article destiné à clôturer ce blog :

Les bœufs avant la charrue, le marché avant l’État :

La permaculture, et plus généralement le jardinage, m’ont fait comprendre une autre règle de bon sens, sans doute encore bien plus simple et évidente, bien que trop souvent oubliée : « sans semis, pas de récolte ». Autrement dit, sans travail pas de revenus : on ne peut pas obtenir de récolte sans avoir semé, entretenu, nourri. On ne peut même pas se nourrir sans avoir récolté, voire transformé et cuisiné. Bref, tout bénéfice requiert un investissement préalable, tout revenu requiert un travail préalable. Donc, non seulement le jardinage m’a appris à « me sortir les doigts », mais également et surtout, il m’a fait prendre conscience que si je reçois un revenu avant d’avoir travaillé pour l’obtenir, cela veut dire qu’il s’agit du revenu de quelqu’un d’autre, lequel revenu lui a été retiré avant de m’être distribué. Que ce revenu, s’il n’a pas été obtenu par consentement, est donc un privilège, lequel privilège provient d’un vol, d’une extorsion.

Ainsi, par ce simple « bon sens paysan », j’ai cessé de croire aux promesses d’une solution collective qui ne passe pas au départ par des solutions individuelles ; j’ai cessé de croire aux vertus de la redistribution, à celles de la dépense publique, à celles de la solidarité universelle, fonction publique, impôts, sécurité sociale et autres « Revenus De Base ». En effet, pour avoir du temps libre, pour prendre des vacances, faire du bénévolat et d’autres choses qui ne sont pas rentables et qui ne rapportent rien d’autre que du plaisir, il faut d’abord pouvoir disposer d’un revenu, d’un prêt ou d’une épargne, donc il faut tout d’abord avoir travaillé (ou bien s’être engagé à le faire dans le cas d’un prêt). Il faut bosser avant de dépenser, et non l’inverse, autrement c’est « mettre la charrue avant les bœufs ». Ainsi, distribuer des revenus ou des droits sans contrepartie, revient à distribuer le travail des uns, à d’autres qui n’ont alors pas à travailler.

Pour dégager du temps libre, et donc pour obtenir la possibilité de faire des choses qui ne soient pas rentables, il faut donc d’abord produire de manière rentable et efficiente. Or, pour produire de manière rentable et efficiente, il faut en avoir la nécessité ; il ne s’agit pas de mourir de faim bien entendu, il s’agit d’avoir l’obligation d’obtenir un bénéfice sur son investissement – ce que ne réclame pas le bénévolat a priori, ni même le fonctionnariat, encore moins les loisirs et la flânerie. Pour avoir les moyens de vivre, il faut d’abord produire du rentable ; si on ne produit que du non-rentable, on ne peut tout simplement pas vivre. Car rien n’est jamais gratuit.

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Cela veut dire que distribuer des revenus ou des droits, ne peut se faire qu’en taxant un travail déjà rentable ; or cette distribution entraînant l’apparition d’activités non-rentables, on obtient alors de plus en plus d’activités non-rentables, et de moins en moins d’activités rentables. S’ensuit un cercle vicieux où l’on est obligé de taxer de plus en plus un travail rentable qui s’étiole de plus en plus, avec de moins en moins de gens productifs et des travailleurs de moins en moins nombreux sur lesquels le système collectif pèse de plus en plus lourd ; et ainsi de suite jusqu’à la crise et la faillite du système collectif. Or c’est malheureusement exactement ce qui se passe aujourd’hui dans notre pays, où l’on assiste à la montée en puissance du chômage et de la dette publique en même temps que grimpent en flèche les prélèvements sociaux et fiscaux.

Et lorsque j’étais dans une démarche d’auto-suffisance, j’étais en réalité dépendant des aides sociales, car une autonomie individuelle est impossible à atteindre (elle ne l’était déjà pas lorsque nous étions chasseurs-cueilleurs, où nous avions déjà besoin de vivre en bande, en société d’individus spécialisés). Le seul moyen d’être véritablement auto-suffisant, sans dépendre de personne, c’est d’accepter de s’intégrer au marché, et de rejeter les fantasmes de partage et de redistribution égalitaire qui nous laissent croire que nous pourrions vivre sans travailler, et sans que d’autres ne travaillent à notre place. Le seul moyen d’être véritablement auto-suffisant, c’est de produire au moins autant que l’on consomme, et d’échanger librement notre production avec celle des autres, en nous entendant mutuellement sur les valeurs respectives de nos productions, c’est-à-dire en effectuant des transactions volontaires.

La solution ne se trouve donc pas dans la redistribution, elle se trouve dans la libre contractualisation, dans le libre échange, dans la coopération volontaire des individus entre eux, dans la libre transaction. Le marché est non seulement un organe de liberté de transaction, mais il est surtout le seul moyen de ne plus être dépendant de la société, de l’État et des décisions politiques. Il est le seul moyen d’affranchissement économique individuel. Le marché, c’est la liberté. La redistribution c’est l’esclavage, c’est l’impôt, c’est l’État, c’est le vol.

 

Nouvelles perspectives :

Aujourd’hui je suis artisan du bâtiment, je travaille à mon compte et je gagne ma vie. Mais je reste tout de même, au plus profond de moi, un intellectuel avant tout (d’ailleurs je connais peu d’artisans du bâtiment qui refont des façades en écoutant France Culture sur leur échafaudage) ; simplement par cette recherche d’auto-suffisance j’ai mis en pratique mes idées, et expérimenté la théorie. Et je me suis heurté à la réalité, laquelle réalité, après m’avoir parue implacable, s’est finalement avérée harmonieuse. De même que l’écosystème peut être implacable lorsqu’on le regarde sous un angle particulier, il apparaît en revanche harmonieux lorsqu’on le regarde de manière globale. Lorsqu’on le regarde ainsi, on s’aperçoit que la nature n’est pas faite que de sélection, elle est également faite de diversité, d’innovation, d’adaptation, de coopération, d’interactions, de complexité, etc. Autant de choses qui rendent cette nature belle, et passionnante à regarder et à étudier.

Ainsi, par la découverte de cette passionnante et complexe harmonie, par la découverte de l’évolutionnisme, de l’individualisme méthodologique et de l’école autrichienne d’économie, et afin de pouvoir valoriser toutes ces réflexions et ces expérimentations que j’ai eues ces dernières années, j’ai décidé de reprendre les études. En septembre dernier j’ai donc fait une validation d’acquis et me suis inscrit en master de géographie, et souhaite m’orienter ensuite vers une thèse. Je pourrai ainsi, à l’instar de Jared Diamond, étudier l’organisation des humains sur la planète comme on étudierait celle de nimporte quelle espèce animale ; je pourrai analyser les relations entre État et marché, entre organisations libres et organisations autoritaires, comme on étudierait n’importe quelle relation entre groupes d’individus ; je pourrai observer le rapport qu’entretiennent les humains avec leur milieu comme on étudie n’importe quel écosystème ; et observer comment les choix diversifiés des individus créent la complexité de l’économie et son équilibre dynamique.

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Voici donc pourquoi ce blog n’a pour moi plus aucune utilité : parce que après ces sept années passées à expérimenter et à intégrer les fondamentaux, me voici enfin prêt à devenir un véritable chercheur, c’est-à-dire un observateur neutre et un analyste objectif. La « graine de flibuste » a germé et a produit suffisamment de racines pour que l’arbre puisse désormais s’épanouir ; et le flibustier est devenu argonaute. Et probablement qu’un nouveau blog fera son apparition, un blog consacré à mes recherches en tant que géographe ; bien entendu, je vous en tiendrai informés.

Je souhaite donc bon vent à tous les permaculteurs et à tous les survivalistes ; bonnes expérimentations, bonnes réflexions et bonnes mises en pratique ; bonnes remises en question, et bonnes redécouvertes des fondamentaux. Quant à moi, après ce « retour à la terre », me voici de retour à la civilisation !



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